Un effondrement sans précédent du neuf à Toulouse

1 décembre 2025

Le dernier bilan de ObserveR de l’Immobilier Toulousain ( l’observatoire du logement neuf à Toulouse) dresse un constat sans appel : 2025 s’annoncerait comme l’“annus horribilis” — l’année la plus sombre pour la promotion immobilière toulousaine depuis près d’un quart de siècle.

Sur les trois premiers trimestres de l’année, l’aire urbaine n’a vu la mise en vente que d’environ 1 600 logements, un volume très éloigné des 4 276 logements proposés trois ans plus tôt. Le déclin touche aussi le nombre d’actes de vente : à peine 1 515 transactions ont été signées, contre 3 728 à la fin de la période post-Covid. Quant au “stock” de logements disponibles, il a été divisé presque par deux : l’offre commerciale s’établit aujourd’hui à 2 383 logements, alors qu’elle dépassait 4 254 logements début 2022.

Le recul ne concerne pas que la périphérie — la ville centre, Toulouse intra-muros, subit aussi un fort choc. Sur le 1ᵉʳ–3ᵉ trimestre 2025, la mise en vente y atteint seulement 800 unités, soit une baisse de 28 % par rapport à l’année précédente. Les ventes nettes y chutent également — 740 ventes seulement, en recul de 43 %.

Pire, l’offre de logements neufs disponibles dans la ville tombe en dessous de 1 200 unités, dans une agglomération de plus de 510 000 habitants, avec une arrivée chaque année d’environ 6 000 nouveaux résidents. Pour l’ensemble des acteurs de l’immobilier, ce constat marque la fin d’une ère — et l’évidence d’une mutation brutale du marché.


Pourquoi un tel effondrement ? Plusieurs causes structurelles

Taux d’intérêt et financement en berne

Malgré un léger recul récent, les taux d’intérêt restent élevés — autour de 3,5 % sur 25 ans — ce qui pèse lourdement sur la capacité d’emprunt des acquéreurs. ce contexte, de nombreux potentiels acheteurs (qu’ils soient investisseurs ou futurs occupants) hésitent, ce qui freine la demande.

Disparition du levier fiscal qu’était le Pinel

L’un des déclencheurs majeurs de cette crise est l’arrêt du dispositif Pinel, à la fin de 2024. Ce système de défiscalisation, largement utilisé dans l’investissement locatif, a longtemps été un pilier de la commercialisation des logements neufs. Son extinction a laissé un vide que le marché peine à combler : les promoteurs ne peuvent plus compter sur une clientèle d’investisseurs séduite par l’avantage fiscal, ce qui fragilise fortement la pré-commercialisation des programmes.

Offre de logements réduite, permis de construire en berne

À cela s’ajoute une raréfaction des permis de construire délivrés — un signal clair d’un ralentissement de la production de logements. Dans l’aire urbaine, le nombre de logements mis en vente a décru de plus de 50 % sur deux ans. Conséquence : l’offre commerciale (logements neufs disponibles ou en chantier) dégringole trimestre après trimestre, ne permettant plus d’absorber la demande, déjà fragilisée.

Coûts de construction et contexte économique défavorable

Le contexte économique général — inflation des coûts de construction, hausse des matières premières, incertitudes financières — pèse aussi sur le marché. Ces contraintes augmentent le coût de revient des logements neufs, limitant les marges des promoteurs et dissuadant certains d’entre eux de lancer de nouveaux projets.

Mutation de la clientèle : les investisseurs désertent, les primo-accédants résistent

Autre phénomène notable : le profil des acheteurs change profondément. Là où, quelques années auparavant, les investisseurs représentaient la majorité des acquéreurs (jusqu’à 60 % ou plus), en 2025 leur part s’est effondrée à environ 20 %. Le marché s’appuie désormais sur les ménages cherchant un logement pour y vivre — propriétaires occupants ou primo-accédants — ainsi que sur des dispositifs d’accession aidée. Cependant, même si ces ventes “occupants” progressent — elles ne suffisent pas à compenser l’effondrement de l’investissement locatif. Le désengagement des investisseurs fragilise la faisabilité économique des nouveaux programmes, d’où la chute spectaculaire des mises en vente.


Conséquences pour le marché, les habitants et les promoteurs

Rarefaction de l’offre — tension accrue sur le logement

La contraction drastique de l’offre de logements neufs, combinée à une demande encore soutenue (à cause de l’attractivité de Toulouse), crée un déséquilibre massif. Résultat : moins de logements disponibles, une pression importante sur les logements existants, et potentiellement une montée des prix ou des loyers.

Retrait des promoteurs — gel des projets

Face à l’incertitude de la commercialisation, de nombreux promoteurs renoncent ou repoussent la mise en chantier de nouveaux programmes. Le manque de garanties sur le succès des ventes les pousse à la prudence. Pour eux, le modèle économique fondé sur la revente rapide à des investisseurs s’effondre.

Risque pour les personnes en recherche de logement neuf

Pour les ménages — primo-accédants, familles ou travailleurs attirés par Toulouse — l’accès à un logement neuf devient plus compliqué et incertain. Le choix se réduit, le délai d’attente peut s’allonger, et la pression sur le marché de l’ancien ou du locatif pourrait s’intensifier.

Impact sur l’industrie de la construction

Le ralentissement du neuf pèse sur l’ensemble de la chaîne : promoteurs, constructeurs, artisans, etc. Avec des projets en baisse, le secteur pourrait voir des réductions d’activité, voire des pertes d’emplois. L’impact pourrait aussi s’étendre aux fournisseurs, matériaux, et à l’économie locale liée à la construction.


Une crise durable — et pour l’instant, peu de perspectives de redressement

Si 2025 est déjà qualifiée d’année “noire”, rien n’indique qu’un redressement soit imminent. Selon l’ObserveR, le troisième trimestre 2025 s’est révélé le pire en 25 ans en termes de volume de ventes et de mises en vente.

Le contexte ne s’annonce guère plus favorable pour 2026 : les promoteurs attendent des mesures de soutien, mais rien de concret ne semble se profiler — surtout après l’arrêt du dispositif Pinel, et en l’absence d’un substitut clair qui puisse attirer à nouveau les investisseurs.

De fait, même si la demande d’occupation (logements pour vivre) reste présente, elle ne suffit pas à relancer un marché du neuf structurellement affaibli. Les promoteurs l’ont compris : sans un réel retour des investisseurs ou une politique incitative forte, les programmes neufs risquent de stagner pendant plusieurs années.


Source la gazette du midi

En résumé — un marché à la croisée des chemins

Le marché du logement neuf à Toulouse traverse une crise profonde et multiple. Moins de logements proposés, moins de ventes, moins d’investisseurs, des coûts de construction élevés, et des dispositifs fiscaux disparus : tous les signaux sont au rouge.

Toulouse, pourtant métropole attractive, voit son offre de neuf s’effondrer — ce qui crée un paradoxe : un besoin croissant de logements pour une population dynamique, mais un marché incapable de répondre à cette demande.

La transformation du profil des acheteurs — individus cherchant l’occupation plutôt que l’investissement — change les règles du jeu. Mais cela ne suffit pas à compenser la disparition massive des investisseurs qui soutenaient jusque-là le marché.

À court et moyen terme, sans impulsion politique, soutien public ou adaptation du modèle économique de la promotion immobilière, le secteur semble destiné à rester en crise. Pour les futurs acheteurs comme pour les professionnels, c’est une période d’incertitude, d’attente — et d’interrogations sur l’avenir du logement neuf à Toulouse.

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